
Tôt ce matin, après avoir promené mon chien dans la neige étincelante, en profitant du soleil qui illuminait tout, en appréciant la beauté et le silence des maisons voisines; je suis rentrée et j’ai fait mon déjeuner (repas du matin au Québec). J’ai réfléchi au bonheur de vivre ici, où les hivers sont rudes mais où la chaleur de ma maison me fait oublier instantanément le froid mordant du début février!
En observant mes oeufs prendre forme, se solidifier dans la poêle, j’ai senti un petit bonheur monter en moi. Une espèce de joie simple consciente de la chance que j’ai de pouvoir manger, de pouvoir savourer le goût tellement unique des oeufs.
J’ai ajouté de belles « toasts » dorées et du beurre d’érable et j’ai profité de chaque bouchée. Mon café était encore meilleur: j’y avais ajouté une larme de « Tia Maria ».
On se complique trop souvent la vie à chercher des « bonheurs » factices, dans des choses qui ne nous donneront qu’un plaisir momentané. La vie que l’on mène (surtout avant la pandémie) nous bouscule et nous voile trop souvent les plaisirs simples de faire son lit, de sentir l’eau chaude de la douche couler sur notre peau, la douceur de la grande serviette de bain.

Nous faisons et répétons tous ces gestes le plus souvent inconsciemment, en pensant à autre chose de « plus » important. Mais qu’y a-t-il vraiment de plus important que d’ouvrir les portes du garde-robe et d’avoir le plaisir de choisir quel vêtement nous porterons aujourd’hui. D’être conscient(e) du moment présent.
Pour moi, déguster des oeufs, saliver devant du beurre d’érable, humer l’odeur de mon café me cause autant de plaisir que de danser librement dans mon salon ou de remarquer que mon chéri a perdu du poids au point où il semble encore avoir le corps d’un jeune homme.
J’aurai 70 ans en avril, c’est bientôt, c’est trop vite à mon goût. Mais les joies de cet âge-là, je les découvre. Je les apprécie et je me rends compte que je me faisais tellement de fausses idées quand j’étais jeune et que je pensais aux « vieux »! Chaque âge a ses bienfaits.
Plus jeune, j’étais obnubilée par le « besoin » d’être belle, d’être sexy, de plaire aux hommes, de travailler fort pour avoir une meilleure vie. De ne pas me marier, de m’instruire, me cultiver et plus encore.
Plus tard, j’étais prise par ma profession, par mon rôle de conjointe et de mère, je fonçais à 100 à l’heure, je dirais même comme un TGV! J’allais où comme ça? Je courais après quoi déjà?

Puis, j’ai eu la « chance » de dénicher cet emploi au départ temporaire au gouvernement fédéral. Par la suite, durant 30 ans, j’ai eu le grand plaisir de sentir que mon travail, les gestes que je posais, les paroles que je prononçais servaient à aider mon prochain. Ca a donné un sens à ma vie, un sens de plus.
En cessant de travailler, en prenant ma retraite, j’ai découvert le calme, la lenteur, la douceur du temps libre retrouvé. Je ne me suis pas étourdie dans d’autres activités. J’ai compris pourquoi parfois sur la rue, dans le métro, les personnes plus âgées que moi ne ressentaient pas le besoin de courir, de marcher vite…

Ces gens-là autrefois, je les percevais comme un obstacle me retardant dans mes déplacements.
Aujourd’hui, non, je savoure chaque pas que je fais, je me promène le corps droit, la tête élevée vers le ciel ou tout simplement, j’observe mon entourage. Souvent je chantonne en revenant à la maison, les bras chargés de mes emplettes ou en dégustant un chocolat belge! Je ne remercierai jamais assez celui ou celle qui m’a parlé du « Ici et maintenant »!
Je découvre ma vie, la vie, le monde qui m’entoure et je suis heureuse si en plus, j’entend un petit oiseau chanter.
Ca mène loin n’est-ce pas de regarder des oeufs frire dans une petite poêle?
Bonne journée à vous.